RIVER LEE CARVER

ftDrew Van Acker

« Tu viens quand ? Pour combien d’jours et pourquoi ? ». Troisième appel de la journée, je me sens un brin « croix rouge », un brin « SPA ». Tous les animaux blessés trouvent refuge chez moi, à mes frais bien sûr, sinon c’est pas marrant. Le petit frère appelle : « 15 jours ». Damn, c’est beaucoup. C’est peu et –franchement- ça m’fait chier un peu : « D’accord mais pas un jour de plus ». Je raccroche, il va dormir sur le canapé, avec le reste des chiens battus, des chiens abandonnés. Un peu QG, mon chez moi. Un peu « naïf », moi. Pas grave, pour moi les amis, ça compte, ça ne s’oublie pas et puis ça se choisit et parfois pas. La famille ça s’impose et ça ne pardonne pas. Les amis, c’est un de perdu, un de perdu. Tant pis mais, j’suis comme ça.

" S'il te plait, Lee. J'ai vraiment besoin de ce fric. J'arrive pas à joindre les deux bouts". C'est ce qu'elle m'avait dit. Bonne poire, le Carver ? Un peu quand même. Deux jours plus tard, je tombai sur elle, dans une tenue chic, une tenue signée Chanel : " T'arrivais pas à joindre les deux bouts d'la ceinture que tu portes là ? Laisse-moi deviner : elle t'a coûté 587 $, c'bien ça ?". Amer, rancunier ? Même pas pourtant, j'aurai de quoi le devenir avec un entourage pareil. J'oublie vite, dans un sourire, je crachai : " Elle te va bien mais la prochaine fois, évite de me mentir sur tes intentions. C'pas la peine de m'rouler".

Ma vie est tellement emmerdante que je dois vous la raconter après tout il faut bien que j'parle de mes casseroles de temps à autre pour m'soulager.

" Hey duchmolle, je te donne cinq secondes moins deux pour enfiler tes fringues et t'bouger l'derche de mon canapé. J'avais dit : quatre jours pas DEUX MOIS. Va falloir que je te récite la définition du parasite ou c'bon, tu peux chercher dans l'dico seul comme un grand?" Mon meilleur ami, celui qui visiblement n'avait pas la notion du temps, me sourit et rétorqua qu'il lui fallait encore quelques jours : " Bro', j'veux bien mais à c'train la, franchement : faut que tu te mettes à payer ta part de loyer. J'suis pas Crésus " " Arrêtes l'discours Lee, tu t'fais plein de thunes". Les yeux ronds, je souriai, il avait raison mais ce n'était pas de bon coeur que je comptai le kicker hors de mon antre, je tenais simplement à ce qu'il retrouve un train de vie descent. " Tu vas finir par me rendre chèvre. Ecoute, même si tu n'payes pas, contribue au moins au ménage. C'pas difficile de passer l'balais ou encore d'essuyer les auréoles de café quand tu bois ta tasse. Sérieux : encore une tâche du genre sur ma table basse et tes fringues, elles iront dormir à la belle étoile...ET TOI AVEC" fini-je, me dirigeant vers les escaliers pour monter à l'étage. Quel boulet, celui là.

" Papa, regarde un peu mon joli dessin" je jetai un furtif regard aux gribouillis qui figuraient sur le bout de papier blanc, l'oeil curieux, qu'est-ce que c'était que ce...: " Tu peux m'dire ce que représente le zigouigoui là, sur le côté ?" demandai-je, un sourcil arqué, totalement paumé. Il faut dire, les gosses quand ça dessine , c'est à se tirer une balle. C'est de l'art , de l'art à jeter dans une poubelle mais bizarrement allez savoir pourquoi ça finit accroché sur le frigo : " Bah..c'toi, ça s'voit nanméo". Nanméo, un peu de respect envers ton séduisant papounet, gamine. " Pardon ? Papa n'est pas comme ça. Papa est grand et musclé. Pas petit et gros. J'vais t'inscrire à des cours de dessins ,ma chérie." soufflai-je, on va tenter d'encourager le progrès, ajoutai-je alors que la magnifique tête blonde s'installait dans le salon devant son éponge gay qu'elle nommait joyeusement : BOB.

Lullaby Liv Carver. Mon troll à moi, née de l'amour fendu ( et non défendu) entre un adolescent Texan et une emmerdeuse New Yorkaise. Eté 2003. Eté 2003, disons, conception du petit monstre, aussitôt conçu aussitôt boulversant. A cette époque, j'comprenais pas pourquoi c'drame était tombé sur moi, moi, River Lee papa ? J'étais pas vraiment le seul à avoir tourné de l'oeil à l'annonce des résultats, la maman aussi. La maman, parlons-en, j'étais - jadis, hein, carrement plus maintenant post action- persuadé être fait pour elle et elle, pour moi. Remarquez j'avais 18 ballets, rien dans l'crâne à part des rêves de devenir RockStar ou joueur de foot professionnel. J'avais des rêves et c'est vraiment là que le bat blesse j'ai fini à devoir m'écorcher l'train pour offrir à ma petite fée une vie bien. Hélas, ouai y'a toujours un hélas qui sort du chapeau : mes études universitaire commencées, la rupture a pointé. La mère et moi, on s'est séparés, on s'est éclatés la tronche et elle s'est barrée me laissant la gosse sur les bras. Ca allait bien, du moins, jusqu'à ce que je doive me concentrer davantage sur mon taf. Pendant plus de cinq ans, j'ai galéré et alors que j'étais sur le point de devenir interne, PAF (y'a pas de chocapics) : la plus belle ( aka ma mioche) est tombée malade, j'ai dû faire un choix.

Rien de grave, rien de bien méchant mais SYSTEME IMMUNITAIRE méga pourri. Je n'ai pas pu devenir le médecin que je cherchais à devenir, tant pis, j'suis devenu le papa gâteau super étouffant. Bon appétit, petite. " Pa'..." Pitié pensai-je : " Pa' j'vais bientôt avoir 9 ans " Déjà ? NEUF ANS ? Ca grandit vite ces trucs-là. On a à peine l'temps de fermer les yeux pour se rendre compte qu'ils ont l'âge d'aller à la fac. " Il faut que je te présente mon namoureux". Me présenter quoi ? Pardon sale gosse: " Me présenter comment, hein ?" crachai-je, les yeux ronds de suprise, bordel, son "namoureux" ? Un namoureux à cet âge là ? Ils jouent au docteur ? MAGGLE. " Bah oui, mon namoureux rien qu'à moi. Il s'appelle Ryan, il a 10 ans " Il s'appelle Ryan, il a 10 ans. Quelle merde, là, il a 10 ans, il est assexué : j'lui donne 4 ans pour s'faire travailler par ses hormones et moi, je lui donne 4 ans pour s'éloigner sec de ma fillette sinon : BAM. " Oui ma petite fée, pourquoi pas" Un sourire étire ses lèvres tandis que les miennes s'étirent d'une expression l'air de dire : pro-hypocrisie. Y'a pas d'quoi s'en faire, n'est-ce pas ?

" Lullaby est une enfant très...intelligente, vraiment : éveillée" " A bon ?" la surprise lisible sur mes traits n'était pas vraiment habituelle...du moins, je n'avais pas réellement l'habitude d'entendre de la bouche des maitresses que ma gamine était " éveillée", en général : Lullaby était d'après leur dire un véritable petit démon, aussi, je fus sur le Q : " Tope-la, sweetie" " Papa, j'aurai l'droit à mon piège à souris ?" Le regard effrayé de son institutrice criait au scandale. Quoi, est-ce qu'il y avait un inconvéniant à ce qu'une mioche de 9 ans réclame un piège à souris ? Pour les torturer ? ...//